L’anarchisme autour du monde: l’anarchisme bulgare
Dans cette nouvelle série d’article nous vous présenterons, à travers lieux et périodes, des textes qui nous semble très intéressant historiquement et avec un contenu toujours d’actualité instructif.
Pour information, il est question d’anarcho-communisme, ceci n’est pas un mélange « ratatouille » d’anarchisme et de marxisme. L’anarchisme est contre toutes dictatures, donc anti-communisme marxiste. C’est, comme il y a un courant dit « individualiste » qui se réclame de l’anarchisme, le mot « communisme » est parfois rajouter. A prendre « communisme » comme l’écrivait Kropotkine, dans son sens premier de « mise en commun des moyens de production ». Les anarchistes révolutionnaires bulgares ont notamment subit la répression et les persécutions des « fascistes rouges ».
Ce texte est le dernier programme élaboré et publié dans un pays sous domination marxiste
léniniste.
Plateforme de la Fédération
des Anarcho-communistes de Bulgarie (1945)
Bases fondamentales
Nous refusons le système social actuel de la centralisation étatique et du capitalisme, parce qu’il est fondé sur le principe de l’État, qui est contraire à 1’initiative et à la liberté du peuple. Tout pouvoir signifie des privilèges économiques, politiques ou spirituels. Son application sur le plan
économique représente la propriété privée, sur le plan politique l’État, sur le plan spirituel la
religion. Ces trois formes de pouvoir sont liées. Si on touche l’une, les autres se modifient, et
inversement si on conserve une forme de pouvoir, cela entraîne inévitablement le rétablissement des
deux autres. Voilà pourquoi nous repoussons le principe même du pouvoir.
Nous sommes partisans de l’abolition de la propriété privée, de l’État et de la religion et de la
suppression complète de toute forme et institution de contrainte et de violence.
Nous refusons tout enseignement et tout mouvement sociaux, politiques et économico-politiques
visant au maintien de l’État, de la propriété privée, de l’église, de la contrainte et de la violence
dans les rapports sociaux.
Nous repoussons le fascisme, qui représente une tentative historique de restaurer l’absolutisme,
l’autocratie et la puissance de la forme politique du pouvoir dans le but de défendre la domination
économique et spirituelle des classes privilégiées.
Nous refusons la démocratie politique, parce qu’elle ne prévoit pas la disparition du principe du
pouvoir, qu’elle conduit à la désorientation des masses populaires en les entraînant, par les
mensonges et les illusions, dans des combats contraires à leurs intérêts et en les corrompant, par
l’exercice du pouvoir et le maintien de 1’appétit de domination. En outre, la démocratie politique se
montre totalement incapable de résoudre les grands problèmes sociaux et maintient le chaos, les
contradictions, les crimes, découlant de fondements sociaux basés sur l’État centralisé et le
capitalisme.
Nous repoussons le socialisme étatique parce qu’il mène au capitalisme étatique : la forme la plus
monstrueuse d’exploitation économique et d’oppression et de complète domination des libertés
sociale et individuelle.
Nous sommes pour le communisme anarchiste ou communisme libre, qui substituera la propriété
privée par la socialisation complète des terres, des usines, des mines, de tous les instruments de la
production et des biens. L’État sera remplacé par la fédération des communes libres, unies
régionalement, provincialement, nationalement et internationalement. L’église et la religion seront
remplacées par une morale individuelle libre et une vision scientifique.
Le communisme anarchiste, à la différence de toutes les autres conceptions et organisations socioéconomiques et politiques, est fédéraliste.
La nouvelle organisation sociale qui remplacera l’État, sera construite et fonctionnera de bas en
haut. Tous les habitants d’un village donné formeront la commune libre locale, et toutes le
communes libres locales s’uniront régionalement, provincialement, nationalement et
internationalement dans des unions et des fédérations et dans une confédération générale sociale
universelle.
La nouvelle organisation de production de la société sera formée par un réseau compact
d’innombrables entreprises agricoles locales, d’artisans, de mines, d’industrie, de transport, etc.,
unies au plan régional, provincial, national et international dans des unions et des fédérations de
production dans une confédération générale de la production.
La nouvelle organisation d’échange, de consommation et d’alimentation de la société sera
également représentée par un réseau dense et complexe d’organisations, d’unions et de fédérations
régionales, provinciales, et nationales, groupées dans une confédération générale de l’échange et de
la consommation pour la satisfaction des besoins des habitants de partout.
C’est de la même façon que sera organisée chaque activité sociale humaine et les transport, les
communications, l’éducation, la santé, etc.
Dans ce système organisationnel de toutes les fonctions des différents aspects de la vie sociale, il
n’y aura pas de place dans la société pour aucun pouvoir de l’individu sur l’individu et pour aucune
exploitation de 1’homme par l’homme.
Le principe fondamental de la production et de la distribution pour la construction du nouveau
système social sera : Chacun produira selon ses forces et ses possibilités et chacun recevra selon ses
besoins.
La tactique
La réalisation de cet idéal social d’égalité, de solidarité et de liberté ne peut être que le fait des
travailleurs et des masses paysannes unies, inspirées par le communisme anarchiste et organisées
par ses groupes idéologiques, professionnels, d’échange et de consommation, de culture et
d’éducation.
Le communisme anarchiste, tout en repoussant l’État, refuse la participation des travailleurs aux
organes administratifs et les institutions de l’État, parlement et à tout scrutin pour gérer
officiellement l’État.
L’anarchisme ne reconnaît, comme unique moyen de combat efficace, et comme défense des
intérêts quotidiens des masses laborieuses, de même que pour la réalisation de 1’idéal complet de
liberté de l`humanité, que l’action directe des travailleurs eux-mêmes, mise en pratique par leurs
organisations économiques, exprimée par les grèves, les sabotages, les boycottages, les grèves
générales, les insurrections et la révolution sociale. En conséquence, l’anarchisme refuse toute
forme d’organisation et de combat de parti politique, en la considérant comme stérile et inefficace,
et parce qu’elle ne répond pas aux buts et aux tâches immédiates et aux intérêts des travailleurs des
villes et des villages. La force réelle des travailleurs est dans l’économie et leurs organisations
économiques. C’est 1à seulement que se trouve le terrain où le capitalisme peut être miné. C’est 1à
seulement qu’il y a la véritable lutte de classe .
L’organisation
La réélaboration sociale radicale que prévoit le communisme anarchiste demande l’action
organisationnelle de toutes les forces auxquelles cette tâche historique incombe.
Il est avant tout nécessaire que ceux qui sont partisans du communisme anarchiste soient organisés
dans une organisation idéologique anarcho-communiste.
Les tâches de ces organisations sont : le développement, la réalisation et la diffusion des idées du
communisme anarchiste ; l’étude de toutes les questions actuelles et vitales de la vie quotidienne
des masses travailleuses et des problèmes de la reconstruction sociale ; la lutte multiforme pour la
défense de leur idéal social et la cause du peuple travailleur ; la participation à la création de
groupes de travailleurs sur le plan de la production, de la profession, de l’échange et de la
consommation, de la culture et de l’éducation et de toutes autres organisations, utiles à la
préparation de la reconstruction sociale ; la participation les armes à la main à chaque insurrection
révolutionnaire ; la préparation et l’organisation de celle-ci ; utilisation de tout moyen positif pour
s’approcher de la révolution sociale.
Les organisations idéologiques anarcho-communistes sont absolument indispensables pour la
réalisation complètes du communisme anarchiste jusqu’à la révolution et après .
Ces organisations sont formées sur le plan local et du quartier. Chaque organisation de quartier ou
de localité choisit un secrétaire, dont la tâche est d’être en contact avec les autres organisations
similaires des secrétaires de toutes les organisations de quartier d’une partie avec un certain nombre
d’habitants constituent une organisation générale de localité. Toutes les organisations locales
s’unissent, par régions et par provinces, dans des unions régionales et provinciales. Des contacts
entre ces unions sont assurés par les secrétariats respectifs. Toutes les unions provinciales du pays
s’unissent dans la fédération des anarcho-communistes de Bulgarie, L’activité est coordonnée par le
secrétariat fédéral. Les membres de chaque secrétariat font partie de l’organisation locale, de leur
résidence, et chacune de leur initiative passe obligatoirement par l’organisation locale et apparaît
comme l’initiative de celle-ci. Les secrétariats ne sont que des organes de liaisons et d’exécution,
sans aucun pouvoir.
Les membres des organisations idéologiques anarcho-communistes ne peuvent qu’être anarchistes.
Un deuxième type d’organisation est celle des syndicats des travailleurs également basé sur le
principe fédératif, par entreprises ou par professions, unis en unions de production ou
professionnelles, dans une fédération générale des syndicats de travailleurs.
Ces organisations formées avec la participation des anarcho-communistes adoptent comme tactique
l’action directe et rejette les luttes des partis politiques et l’ingérence des partis politiques dans les
organisations de travailleurs.
Leurs tâches sont : la défense des intérêts immédiats de la classe ouvrière, la lutte pour
l’amélioration des conditions de travail des travailleurs, l’étude des problèmes de la production, le
contrôle de la production et la préparation idéologique, technique et organisationnelle d’une
reconstruction sociale radicale, dont ils auront l’obligation d’assurer la production industrielle.
les membres de ces organisations peuvent être tous les travailleurs qui acceptent sa structure, sa
tactique et ses tâches.
Lorsque les conditions ne permettent pas 1’existence de telles organisations, les travailleurs
anarcho-communistes adhèrent aux autres organisations syndicales indépendantes de travailleurs et
défendent leurs conceptions d’action directe et antiparti. Une telle organisation semble être
aujourd’hui l’ORPS (1).
Un troisième type d’organisation doit englober la paysannerie. Ce sont les organisations
professionnelles agricoles créées localement et unies par région, par province et nationalement dans
une fédération générale, qui, avec la fédération des syndicats de travailleurs, forme la confédération
nationale du travail.
Les tâches des organisations professionnelles agricoles sont :
-défendre les intérêts des paysans sans terre, avec peu de terre et de petite parcelle : -organiser des
groupes agricoles de production, d’étudier les problèmes de la production agricoles ; -se préparer à
la future reconstruction sociale, dans laquelle ils seront les pionniers de la réorganisation de la
production agricole, dans le but d’assurer la subsistance de toute la population.
Les organisations agricoles professionnelles sont construites sur la base de la profession et refuse
tout combat des partis politiques et leur ingérence dans l’organisation. Elles appliquent la tactique
de l’action directe, autant que cela est possible, dans leurs conditions spécifiques, qui peuvent aller
jusqu’au refus de payer les impôts, au boycottage de l’État, aux grèves de production, etc.
Peuvent être membres de ces organisations tous les paysans sans terre, avec peu de terre et une
petite parcelle, qui consacrent leurs efforts ou travaillent eux-mêmes leur terre et une partie
affermée, sans utiliser le travail d’autre salarié.
Lorsque les conditions pour créer de telles organisations n’existent pas, les paysans anarchocommunistes peuvent appartenir à d’autres organisations professionnelles semblables, dans le but
d’y introduire leur vision de l’action directe et du combat contre les partis et de la tactique de
l’action directe paysanne. L’OZPS (2) peut être cette organisation.
Une quatrième sorte d’organisation est celle des coopératives. Les anarcho-communistes participent
à tous les genres de coopératives et y apportent l’esprit de la solidarité et de l’entraide contre l’esprit
de parti et le bureaucratisme. Les coopératives agricoles de production méritent aujourd’hui une
attention particulière, parce qu’elles auront une grande portée et joueront un rôle éducatif décisif
pour la construction future du système social anarcho-communiste.
Un autre type d’organisation est celui des jeunes, des femmes, les groupes antialcooliques, les
espérantistes et autres organisations culturelles, auxquelles appartiennent tous les sympathisants des
idées et de la lutte des organisations idéologiques et économiques anarcho-communistes du peuple
travailleur.
Les rapports entre tous les organisations précitées sont fondés sur un principe de fonctionnement,
qui reconnaît la pleine liberté et l’indépendance des membres et des organisations et exclut toute
intervention extérieure et toute subordination d’une organisation à une autre. La dépendance
réciproque entre les différents types d’organisations ne se base que sur leur communauté et leur
unité idéologiques, la finalité commune à laquelle elles aspirent toutes.
Les décisions organisationnelles dans les organisations anarcho-communistes sont prises à
l’unanimité, et non selon la majorité des voix. La décision de la majorité n’est pas obligatoire pour
la minorité ; la persuasion est toujours recherchée. Dans la pratique, le plus souvent la minorité se
rallie à la décision de la majorité, qui se réserve le droit d’exprimer, après l’épreuve des faits, la
justesse de sa position. Grâce à ce principe, largement appliqué dans le mouvement anarchiste, les
scissions, les inimitiés et les luttes apparaissent rarement.
Cependant, dans les organisations économiques de masses et les autres organisations, les décisions
sont prises à la majorité et sont obligatoires, parce que c’est seulement ainsi que peut se faire
l’unité, qui est absolument indispensable dans les organisations de masse. Mais dans certains cas de
désaccords profonds, la minorité peut être libérée de l’obligation d’appliquer une décision générale,
à condition qu’elle ne gêne pas l’exécution de cette décision.
Toutes les organisations évoquées ont comme tâche commune la préparation à l’échelle du pays de
la reconstruction sociale radicale. Durant la révolution sociale, elles réaliseront, chacune dans son
domaine, l’expropriation et la socialisation des moyens de productions et de tous les biens.
Tâches immédiates
À 1’heure actuelle, la fédération des anarcho-communistes de Bulgarie présente les mots d’ordre
suivants :
-La formation de conseils et de comités locaux libres d’ouvriers et de paysans, élus directement, et
non pas en tant que représentants de partis politiques, organisés et contrôlés par le peuple. Ces
conseils et ces comités doivent prendre entièrement, ou contrôler, la direction politique du pays.
-Le rôle de ces conseils et comités est d’exprimer les souhaits des masses travailleuses et de
coordonner les efforts de tous pour construire et faire fonctionner un système social complet. Unis
sur le plan local, régional et national, ils représenteront la force politique, la pensée et la volonté de
tout le peuple.
-L’adoption par les ouvriers et les paysans bulgares de l’Association In- ternationale des
Travailleurs pour la défense des intérêts mondiaux des travailleurs et faire obstacle à une prochaine
guerre.
-Le refus clair et catégorique de toute forme de collaboration de classes. -La reconnaissance du droit
des travailleurs à lutter librement pour défendre leurs intérêts matériels et améliorer leurs
conditions, à faire grève.
-Le contrôle ouvrier de la production et la participation aux bénéfices.
-La diminution de la différence de salaires et de rémunérations entre les différentes catégories de
fonctionnaires, de travailleurs de l’État, des entreprises privées, avec la tendance à la création d’un
salaire familial.
-L’exemption de tout impôt et contribution des travailleurs, des petits employés, des petits paysans
et de toutes les catégories sociales peu rémunérées.
-L’association coopérative agricole libre et volontaire.
-La coopération libre et volontaire des petites entreprises artisanales.
-Le passage progressif à un système complet coopératif d’échange, d’approvisionnement
alimentaire et de consommation, et à une élaboration coopérative englobant le commerce intérieur
et extérieur et la sécurité sociale .
-L’augmentation des prix de la production agricole jusqu’à un niveau moyen et la diminution
jusqu’au même niveau des prix des produits industriels en prenant pour base les prix de revient réels
et une rémunération juste et égalitaire du travail dans les villes et les campagnes.
-L’organisation du combat contre la spéculation et le marché noir par les associations
professionnelles, de producteurs, d’échange et de consommation des ouvriers et des paysans, et par
la dénonciation et le blâme publics contre tous les spéculateurs et les trafiquants.
-la création et la mise au point de rapports commerciaux réguliers et de qualité dans tout le pays, et
la satisfaction rapide des besoins d’articles de première nécessité : vêtements, chaussures, etc., en
important de l’étranger.
-La stabilisation financière du pays, en simplifiant l’appareil bureaucratique, avec un budget et une
économie de l’État réels, et non prévisionnels, avec une réduction complète de toutes les dépenses
inutiles comme pour la guerre et autres buts, avec une augmentation réelle, et non pas démagogique,
de la production nationale.
-La liberté totale de parole, de presse d’organisation et de réunion pour tous les personnes non
fascistes. La suppression de tout contrôle de l’État et de la police -reste de l’époque fascistes- sur les
coopératives, les syndicats et autres organisations. Dans ce domaine, le gouvernement doit remplir
ses promesses.
-L’opposition à toute dictature qu’elle en soit le nom et la couleur.
-La suppression de la peine de mort, de toutes les lois spéciales.
-La disparition de tous les camps de concentration et de travail, ou de foyers de travailleurs dans le
but de punir ; la dissolution du système même de travail forcé, appliqué comme mesure policière.
-La lutte contre les survivances du fascisme et vigilance contre toute activité antipopulaire, mises en
pratique dans toutes les organisations professionnelles, de production, idéologiques des ouvriers et
des paysans.
-Le groupement de tous les éléments des travailleurs et des démocrates dans une union égalitaire et
militaire pour résister sérieusement et efficacement à la réaction en expansion.
-La réparation des conséquences de la guerre par les criminels de guerre.
-Le licenciement complet de l’armée, la suppression du service militaire obligatoire et de
l’éducation militariste de la jeunesse à l’intérieur et l’extérieur des centres scolaires.
-La création d’une milice populaire volontaire (et non d’un parti), dont 1e recrutement sera
uniquement à base d’ouvriers, et de paysans et contrôlé par les organisations des ouvriers et des paysans.
-L’instruction et l’éducation scientifiques complètes, libérées de toute influence de parti politique et
de classe, largement accessibles aux nouvelles générations ;
-L’assistance médicale gratuite et massive au peuple entier.
-L’exclusion complète de la mainmise de la religion dans l’enseignement et la famille.
-L’assistance à la population sous le contrôle des organisations professionnelles, de production,
idéologiques des ouvriers et des paysans.
-une politique extérieure pacifique et un sentiment d’amitié cordiale envers tous les peuples, sans
aucune préférence raciale.
-Du pain, la liberté, la paix et le travail pour tous les travailleurs et les couches progressives du
peuple bulgare.
Vive la solidarité internationale des travailleurs !
Vive le communisme anarchiste !
Fédération nationale des communes (Bulgarie) I Union générale des communes de I Union locale
des communes de I Communes locales
(l) et (2) Nous n’avons pas retrouvé ces organisations qui désignent respectivement un syndicat
d’ouvriers et un syndicat d’agriculteur